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  La mise en scène

La première donnée essentielle de l'oeuvre est la haine. Haine entre deux familles voisines. Une haine pure, tellement ancienne que personne n'en connaît plus la cause. Une haine qui se nourrit d'elle même, comme un feu ancien qui ne se soucierait plus de sa première bûche. Cette haine est mortifère, elle a besoin de sang frais pour survivre, et chaque rencontre fortuite entre gens des deux familles, membres ou domestiques, donne lieu à un affrontement sanglant.

La deuxième donnée est l'amour. Amour de hasard, coup de foudre du destin qui va faire se consumer les deux enfants issus des deux familles ennemies. Amour total, corps et âmes emmélés, qui, en seulement trois jours et trois nuits, les conduira au martyre et à la mort.
C'est donc bien l'éternel combat du bien et du mal qui nous est livré, et, hélas, le mal sort vainqueur. Comme toujours la haine brutale met à mal le doux amour, et ici, ce sont des adolescents qui sont sacrifiés, ils ont 14 ou 15 ans et ne savent rien de la vie, ni de l'amour. Ils ne connaissent que la haine et sont surpris de cet attrait violent qui les enlace, eux qui sont nés ennemis.

La troisième donnée est l'incroyable bêtise des adultes, la servante de Juliette et le moine confesseur, qui vont enchaîner les maladresses, les mensonges, les remèdes magiques, et vont provoquer la catastrophe, par manque de courage et d'intelligence.

Il s'agit d'une version écourtée de l'oeuvre de Shakespeare. Les scènes de groupes, de rues, les bagarres et les interventions du Prince ont été étées. La pièce est jouée par 3 comédiens, une femme, deux hommes. 6 personnages seulement seront les protagonistes de la tragédie. Une esthétique se dégage de cette réduction. L'histoire est centrée sur l'histoire d'amour, sur le drame seul que vont vivre les amants de Vérone. Dégagée de tout l'aspect "capes et épées" et de son cadre historique, la pièce révèle son "âme", une sorte d'épure, d'acte sacrificiel.

Roméo a un ami : son confesseur, Frère Laurent.
Juliette a une amie : sa nourrice qui l'a vue naître et l'a élevée.
Un acteur jouera les deux rôles, du prêtre et de la servante, sans même changer de robe, avec seulement quelques vêtements accessoires, soit de prêtre, soit de ménagère.
Cet acteur polymorphe jouera aussi le père Capulet et l'apothicaire marchand de poison.
Les autres protagonistes seront évoqués en creux : ainsi la mort de Mercutio et la mort de Tybalt n'existeront que dans le chagrin de Roméo et de Juliette d'être séparés par ce double meurtre.

Juliette, dans cette version, n'a pas de mère ; ainsi l'autorité du père Capulet et la détresse de Juliette devant l'autorité de son père sont décuplées : elle n'a aucun refuge.
Les parents Montaigu, déjà très peu existants dans la pièce entière, sont ici supprimés. Roméo y gagne en liberté, et aussi en fragilité, n'ayant pas non plus de refuge.
Faisant résolument l'impasse sur le "spectaculaire", les combats, bagarres, duels, et les scènes de groupes de garçons faisant assaut de verbe et de virtuosité poétique, cette version de 100 minutes donne à l'oeuvre une droiture et une concision extrème, touchant au plus près le drame et dégageant l'émotion la plus sincère.

Le spectacle est joué en anglais, mais de temps à autre on y entendra d'autres langues : Frère Laurent, natif de Vérone, parle un excellent anglais, mais, dans sa faconde, laisse parfois échapper de l'italien.
La nourrice, d'origine autrichienne, s'exprime de temps à autre en allemand, lorsqu'elle est émue.
La mise en scène est simple, au plus près de l'action, claire et modeste.
Le décor est un plancher incliné avec un voile blanc dans le fond ; entre le pont de bateau et le plateau de théâtre.
Cette tragédie d'amour et de mort contient de la chair et du sang. Nous y mettons notre respect, notre admiration et notre talent.



Romeo & Juliet / Sherlock Holmes / Dorian Gray